L’éditeur musical est-il responsable de tout ?

par | 9 avril 2025 | Musique

Dans une décision rendue le 17 janvier 2025 (TJ Paris, RG n° 22/12054), le Tribunal judiciaire de Paris apporte une réponse claire.

Le litige opposait Warner Chappell Music France à Francis Cabrel, qui demandait la résiliation de ses contrats d’édition conclus dans les années 70-80. Il reprochait à l’éditeur des manquements graves dans la gestion de ses œuvres.

Le tribunal a rejeté l’ensemble de ses demandes. Voici les enseignements à retenir.

1. L’éditeur n’est pas responsable de toutes les contrefaçons

L’auteur reprochait à Warner de ne pas avoir empêché certaines reprises illicites de ses chansons.

Le tribunal rappelle que l’éditeur n’a pas d’obligation générale de surveillance. Il doit réagir avec diligence — ce qu’a fait Warner en proposant des accords ou en suspendant des exploitations litigieuses.

Il n’y a pas de faute sans inaction manifeste ou mauvaise foi.

2. L’éditeur n’est pas responsable d’une prétendue durée trop longue des contrats

L’auteur estimait que les contrats, conclus pour 70 ans post mortem, étaient trop longs et qu’il devait pouvoir y mettre fin unilatéralement.

Or, un contrat pour la durée des droits n’est pas un contrat perpétuel.

Le tribunal rappelle qu’une cession pour la durée légale des droits est licite et conforme au Code de la propriété intellectuelle. Il ne s’agit ni d’un engagement perpétuel, ni d’un contrat à durée indéterminée.

L’auteur ne peut donc pas y mettre fin de manière prématurée.

3. L’éditeur n’est pas systématiquement responsable des atteintes au droit moral

L’auteur se plaignait de ne pas avoir été crédité dans une œuvre contenant un extrait de l’une de ses chansons.

Mais :

  • il n’avait jamais demandé explicitement à l’être,
  • il avait accepté des accords similaires auparavant,
  • et il avait refusé le retrait de l’œuvre.

Le tribunal a donc considéré qu’il n’y avait pas d’atteinte caractérisée à son droit moral.

Tout est question des circonstances.

4. L’éditeur n’a pas la responsabilité de fournir des comptes certifiés

La reddition de comptes est une obligation de l’éditeur : il doit être transparent, mais il n’a pas à tout justifier.

Il doit indiquer à l’auteur :

  • l’origine de la rémunération,
  • et le type d’exploitation qui l’a générée.

L’auteur demandait des justificatifs et un calcul certifié par expert. Or, aucun manquement précis n’était démontré dans les relevés fournis.

L’éditeur n’a pas à produire plus que ce que prévoit la loi, sauf clause contraire.

Chaque situation est unique. Si vous souhaitez en discuter ou obtenir un avis juridique personnalisé, notre cabinet est à votre écoute. Contactez-nous via le formulaire ci-dessous.