Dans quelles conditions est-il possible de parodier une chanson, un programme audiovisuel ou une œuvre d’art ?
Pour mémoire, en application de l’article L. 122-5, 4°, l’auteur ne peut interdire la parodie, le pastiche et la caricature de son œuvre compte tenu des lois du genre. La parodie est une exception au droit d’auteur fondée sur la liberté d’expression. Ce droit de parodier une œuvre originale est toutefois limité aux « lois du genre » qui ne sont pas définies par la loi.
Les « lois du genre » ont donné lieu à de nombreuses interprétations par la jurisprudence.
La cour de Cassation, dans un arrêt du 20 mai 2019, vient tout récemment de préciser la notion de parodie rappelant que l’œuvre seconde (la parodie) doit revêtir un caractère humoristique, éviter tout risque de confusion avec l’œuvre parodiée et ne pas porter une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes de l’auteur. Dans cette affaire, l’hebdomadaire LE POINT avait publié en couverture un photomontage reproduisant partiellement le buste de Marianne immergé sous le titre « Corporatistes intouchables, tueurs de réforme, lepéno-cégétistes… Les naufrageurs – La France coule, ce n’est pas leur problème ».
La veuve de l’auteur du buste avait alors assigné le journal en violation des droits patrimoniaux et moraux de l’auteur.
Dans son arrêt, la Cour de Cassation explicite les éléments constitutifs des « lois du genre » qui doivent être respectées dans le cadre d’une parodie :
– il ne doit exister aucun risque de confusion entre l’œuvre parodiée et la parodie. En effet, à défaut la parodie ne peut être justifiée par la liberté d’expression et constitue une véritable contrefaçon ;
– il doit exister une intention humoristique. La jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne exige même une « manifestation d’humour et de raillerie ». La Cour de Cassation a toutefois considéré que le photomontage était une métaphore humoristique du prétendu naufrage de la République peu important le caractère sérieux de l’article. La finalité humoristique de la parodie est donc désormais qualifiée de manière large. Cette dernière peut servir à mettre en avant des messages politiques, sérieux et dénués de drôlerie mais que la liberté d’expression justifie ;
– il ne doit pas exister une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes de l’auteur (ou de son ayant droit).
La Cour de Cassation a ainsi estimé que ces trois critères étaient remplis et a rejeté l’action de la veuve du sculpteur du buste de Marianne.
Ces principes trouvent à s’appliquer quelle que soit l’œuvre parodiée. Il est ainsi possible dans le domaine musical de changer les paroles d’une chanson à des fins de parodie en respectant ces trois critères sans qu’il soit besoin de demander l’accord des ayants-droit de l’œuvre originale.